Dialogue politique : dernier virage
Selon une source diplomatique digne de foi, Edem Kodjo arrive à Kinshasa ce vendredi 11 mars. Contrairement à ceux qui pensent que ce périple dans la capitale congolaise a pour but de convaincre les anti-dialogue à prendre part à cette grand’messe nationale, le facilitateur vient plutôt pour les points sur les « i » après avoir présenté son rapport à qui de droit, et reçu des injonctions de ceux qui l’ont mandaté. Ce, pour au finish donner un « go » au dialogue, avec ou sans ceux de tout le monde qui émettent librement leurs avis.
Un voyage, pas comme les autres
En effet, l’ex-secrétaire général de l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA), Edem Kodjo, a été désigné facilitateur dans la crise congolaise. Il revient à Kinshasa après quelques jours d’absence.
Entre deux avions, vu la complexité de sa mission, le Togolais qui est membre du groupe des sages de l’UA ne veut pas prévariquer face à la charge lui confiée par Nkosazana Dlamini-Zuma, depuis le samedi 16 janvier 2016.
C’est le lieu de le clamer tout haut, la présidente de la Commission de l’UA jouit dans cette désignation de la complicité de la communauté internationale. Et pour preuve, dans un communiqué conjoint daté du 16 février 2016, l’Union africaine (UA), les Nations-Unies (NU), l’Union européenne (UE) et l‘Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), se référant à la désignation par l’UA d’un Envoyé spécial, en la personne de M. Edem Kodjo, pour entreprendre des consultations sur le dialogue politique envisagé en RDC, ont exhorté l’ensemble des acteurs politiques congolais à lui apporter leur entière coopération.
Ainsi, se rend-il une fois encore à Kinshasa, un dernier virage couronnant les consultations menées au pays et à l’étranger en vue du lancement du dialogue.
Pour ceux qui se posent encore des questions sur la désignation de M. Kodjo, il sied de noter que le Groupe des sages de l’Union africaine a pour rôle d’appuyer la Commission de l’UA en matière de prévention et de résolution des conflits sur le continent.
Fermer les portes de l’arche
Venu à Kinshasa 48 heures après sa nomination, M. Kodjo a rencontré les différentes parties congolaises dont les confessions religieuses, la classe politique, toutes tendances confondues, l’UDPS, la société civile, à l’exception du Front Citoyen 2016 et du G7 qui avaient décliné l’invitation de ce facilitateur. Après Kinshasa, il s’était ensuite rendu à Bruxelles où il avait eu un long entretien avec Etienne Tshisekedi, président national de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), à propos du dialogue. Cette rencontre a été un succès, à en croire des sources.
Après le face-à-face avec Edem Kodjo, le” Lider Maximo » avait rendu public un communiqué clarifiant la position de l’UDPS. Tshisekedi est-il resté campé sur sa position, surtout qu’il a toujours été constant et versatile à la fois dans des prises de position ? Au stade actuel, il est prématuré de l’affirmer tant tous les décideurs du monde, bien que soufflant parfois le chaud et le froid, auraient imposé leur dicta, main sur la nuque des parties au dialogue, visiblement sous le format où il a été convoqué à travers une ordonnance signée le 28 novembre 2015 par le Président Kabila. Actuellement, à moins que les retardataires se rattrapent, l’heure de garder éternellement les portes de Kodjo ouvertes est déjà dépassée.
Et pour ceux qui, jusqu’alors ont dit non à l’initiative du Président de la République, estimant qu’il s’agissait de stratagèmes pour modifier la Constitution, négocier un troisième mandat, ou alors obtenir un glissement pour tenir les élections au-delà du délai constitutionnel, les carottes sont cuites. A l’allure où vont les choses, avec ou sans dialogue, il est visiblement exclu que les élections aient lieu à des dates initialement arrêtées. Cela va de la dynamique politique. Les jours et les semaines s’égrènent au vu et au su de tous, et aucun autre remède ne semble plus efficace que le dialogue.
Cas de force majeure
De son côté, consciente de cette vérité qui ne plaira guère à tous, la société civile « Force vive » de Kinshasa demande au gouvernement et au Parlement de saisir la Cour constitutionnelle pour qu’elle « constate », dans un arrêt, l’impossibilité d’organiser l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel.
Pour Carlos Mupili, coordonnateur de ladite plateforme, « Il est difficile qu’on puisse convoquer l’élection présidentielle dans le délai prévu par la constitution. Il serait profitable que le gouvernement ou le président de l’une des chambres du Parlement saisisse les juges constitutionnels pour plaider le cas de force majeure afin qu’il y ait un arrêt pour limiter un temps pour bien organiser les élections, et éviter le chaos constitutionnel et des contestations ».
Après ce voyage du Facilitateur que d’aucuns jugent d’ultime, les jours pour le démarrage du dialogue sont comptés. Après tout, ça fait plus de 100 jours que le dialogue a été convoqué sur Ordonnance présidentielle ; plus de 50 jours depuis la nomination de M. Kodjo par l’Union africaine.
(Emmanuel Badibanga)