*Tryphon Kin-kiey Mulumba a pris la tête de ceux qui défendent la longévité politique du Président Joseph Kabila. Pour ce faire, il mène depuis peu, une offensive médiatique à l’international. La semaine dernière, il a précisé sa pensée sur Radio France Internationale (RFI). Il affirmait, pince sans rires, que Joseph Kabila devrait encore rester à la tête du pays parce qu’il est un homme d’exceptions qui aura tout donné depuis son avènement aux affaires, pour le triomphe de la paix, de la stabilité et de la prospérité. Il est revenu à la charge, dans les colonnes du quotidien belge Le Soir.
Cette fois-ci, il a déclaré qu’il ne souhaite vraiment pas le report des élections pour des raisons financières, il se bat plutôt pour le maintien de Joseph Kabila au pouvoir afin de poursuivre son œuvre. Pas autre chose. Il n’utilise pas la langue de bois. Joseph Kabila n’aurait commis aucun péché, s’il restait au pouvoir. D’autres, en Afrique et dans le monde, l’ont fait avant lui ou le font actuellement.
Aux USA, dans les années 40, Roosevelt a été reconduit quatre fois. En Ouganda, le Président Museveni est au pouvoir depuis 1986. Au Rwanda, le Président Kagame se prépare à se faire réélire. Kin-kiey justifie ses sentiments favorables à Joseph Kabila par les infrastructures construites par son Gouvernement. Des villes entières sont construites, dit-il.
Dans son étoffe de tête de file de la Kabilie, il plaide pour le changement de mode de désignation du Président de la République. Le débat est lancé.
Ci-après, l’article portant sur « Kabila désir », tel que publié par Le Soir. Kin-kiey y vante, comme jamais personne n’a su le faire auparavant, les réalisations de son champion, Joseph Kabila.
“Kabila désir” ou le désir de Kin-kiey Mulumba ?
« Le « glissement » ? Mais on y est déjà, à moins que ce soit le pourrissement, que peut-être l’opposition souhaite…D’ores et déjà, il est certain que le pays ne sera pas prêt à mener le cycle électoral tel qu’il est prévu. Il faut donc réfléchir à d’autres solutions».
Ministre chargé des Relations avec le Parlement, Tryphon Kin-kiey Mulumba a gardé de son passé de journaliste et d’éditeur (Le Soft) le goût des analyses pointues, dérangeantes, s’il le faut. De passage en Belgique, il nous a confié quelques unes de ses réflexions. Pour lui, «en face, le pouvoir n’a guère d’interlocuteur. Etienne Tshisekedi, le chef historique de l’UDPS, a accepté le principe du dialogue avec le pouvoir, Vital Kamerhe n’est pas pour ce dialogue mais il souhaiterait pouvoir s’entretenir en tête à tête avec le président Kabila. La vérité, c’est qu’aucun parti n’est réellement prêt à aller aux élections dans les délais impartis. Il faut donc réaménager… ».
Ainsi qu’il l’avait déjà confié à RFI, Kin-kiey Mulumba nous confirme qu’il n’est pas réellement favorable au « glissement », c’est-à-dire, à un recul de la date des élections pour des raisons techniques ou présentées comme telles, (manque de financement, absence de la communauté internationale qui est loin d’être prête à financer l’exercice….). Pour lui, qui a mis sur orbite un slogan simple « Kabila désir », il n’y a qu’une solution, voir Joseph Kabila rester au pouvoir afin de poursuivre le travail commencé.
Eloquent, Mulumba ne se fait pas prier pour rappeler les réalisations du « Chef » : « le pays est en pleine construction, le Congo a, enfin, décollé. Même dans l’arrière-pays, on construit des infrastructures, les routes sortent de terre, à Kinshasa le nouvel aéroport a été inauguré ainsi qu’à la Luano (Lubumbashi), la Société des chemins de fer a été dotée de nouvelles locomotives, des villes nouvelles sont en construction, la stabilité est rétablie, la production de cuivre a atteint le record historique d’un million de tonnes par an…. Jeune encore, le Président est en pleine possession de ses moyens, pourquoi le mettre en congé alors qu’il a encore tant à faire… »
Le ministre ne nie, cependant, pas la réalité des mouvements populaires. Mais, il minimise la portée des émeutes de janvier et relativise les injonctions internationales : « lors de son voyage en Afrique, le président Obama a dit que les présidents devaient respecter leurs constitutions, ne pas s’éterniser au pouvoir. Mais, il oublie que dans son propre pays, le président Roosevelt a été reconduit quatre fois. Qu’en Ouganda, le président Museveni est au pouvoir depuis 1986. Qu’au Rwanda, le président Kagame se prépare à se faire réélire. Ce qui compte pour moi, ce n’est pas la personne de Kabila, c’est le Congo. Il faut maintenir l’élan actuel… ».
Un éventuel changement de constitution n’émeut pas le ministre, qui rappelle que l’essentiel, c’est de préserver les acquis de la démocratie, « notre presse est l’une des plus libres du continent, la population congolaise est très attachée à ce climat de liberté. ». Mais surtout, pour défendre une prolongation de M. Kabila à son poste présidentiel, le ministre, un « vieux de la vieille » qui connut la fin du mobutisme et participa à la rébellion du RCD/Goma, ne craint pas les accents prophétiques : « la guerre n’est pas nécessairement derrière nous. La région n’est pas stable, les périls restent nombreux : la rébellion du M23 n’a pas totalement désarmé, il y a toujours des violences à Beni, le péril islamique est une réalité, on parle de la guerre de l’eau… Autrement dit, le Congo a besoin, a envie d’un homme comme le président Kabila… ».
Le seul point sur lequel M. Kin-kiey Mulumba ne communique pas, ce sont les sentiments du président, lui-même. Lui, c’est clair, il désire Kabila. Mais Kabila lui-même, désire-t-il poursuivre, en dépit des termes de la Constitution, et des exemples du Burkina Faso et du Burundi où la perspective d’un troisième mandat a suscité les troubles que l’on sait ?
L’avenir dira si l’influent ministre a levé un coin du voile ou pris ses propres désirs pour la réalité…
Tiré du journal belge Le Soir
(Le titre et le chapeau sont de La Prospérité)