L’Ougandais a surpris beaucoup de monde hier jeudi 19 janvier 2017 en annonçant pompeusement l’arrestation, sur son territoire, d’une centaine d’ex-combattants du défunt M23 (Mouvement du 23 mars 2009). Les intéressés auraient été démasqués à bord de quatre véhicules civils où ils auraient pris place, comme des voyageurs ordinaires, en route pour le Nord-Kivu, en République Démocratique du Congo. Après leur arrestation, ils auraient été conduits vers un autre site de cantonnement, à savoir le Quartier général de la 2me Division de l’armée ougandaise, dans la ville de Mbarara.
Selon le gouvernement ougandais, les intéressés se seraient échappés de leur site de cantonnement, à l’Ecole militaire de Buhanga, où ils étaient consignés depuis la déroute de leur mouvement rebelle devant les forces coalisées FARDC/Monusco, en octobre 2013. Il semble que ce site hébergerait encore 270 éléments ex-M23. Le communiqué remis à la
presse par les autorités ougandaises souligne que l’Ouganda reste engagé à respecter l’Accord de Nairobi conclu en 2014 entre le gouvernement congolais et le M23, sous la médiation de leur Chef de l’Etat, Yoweri Museveni.
Cette annonce est d’autant surprenante qu’elle intervient quarante huit heures seulement après que le gouvernement ougandais a démenti, de la manière la plus formelle, la fuite d’ex-éléments M 23 de leur site de cantonnement et leur présence en territoire congolais, ainsi que le soutenaient, le week-end le gouverneur du Nord-Kivu, Julien Paluku, et le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende Omalanga. Kampala a même accusé la partie congolaise d’avoir monté un scénario visant à lui faire porter la responsabilité d’une rébellion fictive au Nord-Kivu.
Les observateurs se demandent, dès lors, à quel jeu se livre le gouvernement ougandais. Comment peut-il affirmer à la fois une chose et son contraire, à savoir le cantonnement strict d’ex-combattants M 23 à Buhanga et leur fuite de ces lieux ? Quant aux chiffres en circulation au sujet des effectifs de ces ex-rebelles, ils ne peuvent que semer le doute dans les esprits. On se souvient qu’au moment de leur défaite militaire, en octobre 2013, le nombre de ceux qui se seraient réfugiés en Ouganda, sous le commandement du colonel mutin Sultani Makenga, ne dépassait pas 200 unités.
Il est dès lors bizarre d’apprendre qu’en dehors la centaine d’éléments interceptés, il y en aurait 270 au camp de Buhanga, sans compter les deux cents assaillants signalés par le gouvernement congolais du côté d’Ishasha, au Nord-Kivu. Mine de rien, c’est comme si les ex-combattants M 23 formeraient déjà un bataillon. Kampala devrait expliquer à Kinshasa le gonflement subit des effectifs de ces hors-la-loi.
La Monusco flouée ?
L’autre intrigue qui appelle un éclairage urgent réside dans le fait que jusqu’à preuve du contraire, la Monusco n’a pas encore décelé le moindre indice de la présence d’ex-rebelles M 23 au Nord-Kivu. Quand on pense aux moyens logistiques en sa possession au niveau de la frontière ougando-rwando-congolaises, notamment des drones, des hélicoptères de combat, des troupes et engins au sol, on devrait se demander comment elle n’a toujours pas pu établir la présence de cette force négative en territoire congolais, alors que cette dernière livrerait, depuis le dimanche 15 janvier 2017, des combats contre les FARDC dans la périphérie d’Ishasha. Ces combats seraient-ils réels ou fictifs ? La mission onusienne a déclaré, mercredi dernier, attendre le rapport du Mécanisme Conjoint de Vérification.
Manipulation politique ?
Au regard du flou qui continue d’entourer la présence ou non d’ex-combattants M23 au Nord-Kivu, d’aucuns se demandent si cette situation sécuritaire n’aurait pas un lien avec l’Accord politique du 31 décembre 2016 qui tarde à se mettre en œuvre. Il est évident que si une rébellion s’installe dans cette partie de la République, ceux qui ne veulent pas qu’il soit appliqué dans la tranche de 12 mois auraient toutes les raisons du monde d’évoquer un cas de force majeure pour faire glisser le processus électoral au-delà de 2017 et gagner du temps pour un coup fourré contre la démocratie.
D’où, il est à souhaiter que le Mécanisme Conjoint de Vérification fasse diligence pour fixer l’opinion tant nationale qu’internationale sur l’état réel des troupes de l’ex-M23 en Ouganda, au Rwanda et en RDC. Quant à la Monusco, il n’y a rien d’autre à lui demander que le recours au Chapitre VII dans l’hypothèse d’un agenda de déstabilisation du grand Congo à partir de son ventre mou qu’est sa partie Est.
Kimp/lephareonline.net