Julien Paluku : un « vertébré » à la territoriale depuis 17 ans et 8 ans comme gouverneur du Nord-Kivu

Julien Paluku, parcours exceptionnel d’un homme qu’on n’attendait pas en politique.

Une enfance ordinaire dans son Nyamilima natal, Julien Paluku Kahongya sent l’avenir s’ouvrir devant lui à l’entrée de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la libération du Congo (AFDL).

Il saisit sa chance et s’inscrit dans la logique des libérateurs sous Mzee Laurent-Désiré Kabila en 1996. Après une formation au centre de Rumangabo, il fait partie de la première équipe des territoriaux de l’école de Léonard Kanyamuhanga. Il est nommé Administrateur du territoire de Lubero. Les contingences géo-politiques qui secouent l’est de la RDC font que la province du Nord-Kivu soit convoitée par le Rwanda et l’Ouganda. Dans cette division de fait de la province, le territoire de Lubero se retrouve sous la gestion de RCD/K-ML parrainé par l’Ouganda. Julien Paluku devient alors Administrateur du Territoire de Lubero sous le commandement du RCD/KML, malgré lui et il doit composer avec Mbusa Nyamwisi.

Grâce à son savoir faire, Mbusa Nyamwisi trouve en lui un jeune homme calme, réfléchi et travailleur et juge opportun de lui confier la gestion de la ville de Butembo en 2004.

Là aussi, les choses ne sont pas faciles car malgré son appartenance à la foi catholique, il est jugé chrétien timide et évoluant comme un électron libre.

La notabilité de la ville de Butembo accepte à peine sa présence et, dans un jeu politique au contour flou, la notabilité de Butembo accorde ses violons avec l’autorité du RCD/K-ML pour que Julien Paluku Kahongya cède sa place de Butembo pour occuper la mairie de Beni.

Un maire visionnaire

En 2005, Julien Paluku Kahongya occupe le bureau de l’Hôtel de ville de Beni et réaménage la résidence du Maire. A cette époque, tous les maires qui lui ont succédé n’ont aucun moyen de locomotion et marchent à pied. Julien Paluku Kahongya instaure l’autorité de l’Etat et maximise les recettes en les canalisant au compte du Trésor.

Il est le premier à doter ses deux adjoints de moyens de transport. Jules Mungwana et Jonathan Nyanza ont chacun une voiture. Deux mois après, le maire dote la mairie d’une Jeep Toyota. La ville de Beni connaît des changements à tous les niveaux. C’est à cette occasion que le journal Les Coulisses va primer quinze (15) meilleurs gestionnaires du Grand nord dans tous les domaines.

Parmi lesquels l’ONG Solidarités qui vient de doter la ville d’eau potable, l’Enra et M. Robert Ducarme avec leur aérodrome, Musavuli Mandrabi pour l’aviation, les sœurs Orantes pour avoir lancé le premier Cyber Café de Beni, Mario avec le Club Palma, ZSL pour le PNVi, Tsongo Kasereka … et Julien Paluku Kahongya pour la gestion moderne de la ville de Beni. Julien Paluku Kahongya vise la députation provinciale après tant d’expériences acquises. Et il y croit. Il lègue à son adjoint tous les pouvoirs jusqu’au véhicule avant la fin de son mandat pour se consacrer à préparer l’opinion du territoire de Lubero à lui faire confiance. Il sera afin élu député provincial du Nord-Kivu.

Un animal politique

Au niveau provincial où les alliances (contre nature) se font et se défont pour le poste du gouverneur de province, Julien Paluku Kahongya déjoue tous les pronostics et réussit à battre d’autres coalitions grâce au duo qu’il a formé en dernière minute avec Maître Feller Lutayichirwa Mulwahale qu’il a détourné au niveau du port de Goma.

Julien Paluku est élu gouverneur dans un jeu très compliqué où le RCD/K-ML et les hommes de Kabila ont travaillé séparément. Il se trouve devant un dilemme. Il doit servir Mbusa Nyamwisi et Joseph Kabila. Cela passe encore parce qu’il se retrouve dans la même famille politique. Mais il y a un malaise. Le premier couac intervient lorsque la notabilité du Nord-Kivu à Kinshasa organise la réception de leur gouverneur à la résidence de Pay Pay.

Une heure avant la réception, alors que tout est prêt, Julien Paluku annule sa présence au motif que Mbusa Nyamwisi boude cette rencontre. Julien Paluku comprend qu’il n’est pas facile de gérer Mbusa Nyamwisi et le RCD/K-ML. S’il veut se maintenir à la tête de la province comme gouverneur, il doit obligatoirement « trahir » le RCD/K-ML mais il ne peut rien parce qu’il en a encore besoin.

Comme gouverneur, Julien Paluku doit disposer d’une assise confortable dans Beni et Lubero. Il sait aussi que Mbusa Nyamwisi compte beaucoup sur lui. Julien Paluku en profite pour se faire introniser par les chefs coutumiers du territoire de Beni en plein rond point de la ville de Beni. Il rêve grand et voit loin. Il comprend qu’en réalité Mbusa Nyamwisi et lui n’ont pas la même vision de la politique. Julien Paluku doit s’affirmer aussi comme leader Nande (parce que certains lui contestent ses origines nande, à cause de son accent linguistique). Aux élections de 2011, la rupture est totale entre Mbusa Nyamwisi et lui : « Nous avions décidé de soutenir Joseph Kabila mais aussi d’avoir plus de 25 députés  à l’Assemblée nationale afin de constituer une force et de rafler de postes ministériels importants. Le volte-face de Mbusa Nyamwisi nous a dérouté surtout qu’il ne nous a pas expliqué pourquoi il quittait la Majorité Présidentielle », nous déclare Julien Paluku. Et comme il le dira devant les forces vives à Beni « la famille politique n’est pas la famille biologique. Chacun fait son choix ».

Pour lui, il n’a jamais trahi qui que ce soit mais il a fait son choix. D’où, la création de son parti politique le BUREC. Dans cette volonté de se frayer du chemin, le BUREC est implanté au Maniema et à Kikwit.

Gouverneur de la guerre

Devenu gouverneur, Julien Paluku est confronté à une situation d’insécurité durant les huit (8) ans. Il doit faire face au CNDP ; il doit faire face aux groupes armés locaux ; il doit faire face aux groupes armés étrangers. Bref, il est comme quelqu’un assis sur des grenades.

La guerre ne lui permet pas de maximiser les recettes et d’appliquer son plan d’action pour la province. Il faut attendre la défaite du M23 (2013) et la traque des ADF/Nalu (2014) pour juger honnêtement le bilan de Julien Paluku.

En 2014, on le voit à l’œuvre. Il se lance dans la réhabilitation de la voirie de Goma. Notamment, de l’ancienne route Kibarabara. Plus d’un kilomètre ont été réhabilités. Aujourd’hui, il s’attaque à la réhabilitation de quelques avenues importantes dans la ville, dont les avenues Bukavu et l’autre vers la mosquée de Birere. Julien Paluku est notamment l’initiateur de l’école du « Cinquantenaire » située à Mugunga, à plus de 10 km de la ville de Goma. Cette grande école a notamment des sections comme la Pétro-chimie, Construction bâtiment, Aviation, Génie civil. Il lance les 5 piliers pour 2014 définis par la remise au travail, la lutte contre la fraude et la corruption, la réhabilitation de la sanction, la mobilisation maximale des recettes et la reconstruction des infrastructures.

Parlant de la lutte contre la corruption, le Gouvernement provincial a mis en place l’OBLC. L’office pour la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption. Cet office est très efficace. Car, on connait des situations ou les chefs de division, les cadres ou agents de la DGR-NK ont 7 été suspendus pour corruption. Cet office est aujourd’hui sur un autre dossier de corruption. Le gouvernement Kahongya a financé les travaux de construction d’une passerelle vers l’Institut de Goma. Curieusement, Airtel a contribué aussi avec au moins 12 mille dollars, sans que Julien Paluku ne soit au courant. Cet argent aurait été perçu par un des conseiller du gouverneur ainsi que le maire de la ville de Goma. L’affaire est aujourd’hui entre les mains de l’OBLC.

Gouverneur d’une province dont le chef-lieu est la « capitale du viol », Julien Paluku rencontre différentes personnalités pour le plaidoyer.

Certains observateurs pensent que le gouverneur Julien Paluku a négligé la Justice notamment dans les territoires de Masisi et Walikale où les magistrats n’ont pas des bureaux. Julien Paluku Kahongya, corpus alienus (corps étranger) en politique dans les années 95-96, a fait une ascension spectaculaire et rapide qu’il lui est difficile à ces jours de vivre sans la politique, déclarait Giovanni Piumatti.

Les Coulisses