L’ONG Greenpeace a appelé mardi les États-Unis, l’Europe et la Chine à boycotter le bois coupé illégalement dans le nord de la République démocratique du Congo par la société forestière Cotrefor, l’accusant de nuire à l’environnement.
«Malgré l’anarchie caractérisant ses opérations, Cotrefor parvient à exporter et commercialiser son bois dans de nombreux pays à travers le monde, y compris l’Union européenne (UE), les États-Unis et la Chine», indique le communiqué publié mardi avec le rapport.
«Greenpeace Afrique appelle les clients de Cotrefor, ainsi que les autres clients en aval de la chaîne d’approvisionnement, à retirer le bois Cotrefor de la vente et à s’abstenir de tout achat (…) jusqu’à ce que la légalité du bois puisse être assurée», souligne le rapport.
La Compagnie de Transport et d’Exploitation Forestiere (Cotrefor), qui exporte également en Afrique, est une société de droit congolais à capitaux libanais qui dispose de deux concessions en RDC: une dans le territoire de Befale, dans la province de l’Équateur (nord-ouest), et une dans le territoire de Banalia, dans la province Orientale (nord-est).
Le rapport de Greenpeace – intitulé Exporter le chaos: l’impact local et international de l’exploitation forestière illégale en RDC – est le fruit de deux ans d’investigations menées dans les concessions de Cotrefor «et dans divers ports à travers le monde où le bois est exporté et commercialisé».
Bilan: Cotrefor se livre à une exploitation «illégale et destructive» mettant en péril «les espèces menacées comme les Bonobos (singes que l’on ne trouve qu’en RDC) et l’afrormosia (variété précieuse de bois), sans pour autant tenir ses promesses de développement local durable et d’engagements sociaux vis-à-vis des populations, résume Raoul Monsembula, coordinateur national en RDC pour Greenpeace Afrique, dans le communiqué.
Pour que Cotrefor puisse exporter malgré tout, «il doit bien y avoir des importateurs désireux de commercialiser du bois illégal, ou du moins douteux, et des gouvernements dans les pays d’importation incapables de mettre en oeuvre et faire respecter les lois européennes et internationales visant à prévenir ce genre de transactions», accuse-t-il.
Greenpeace critique aussi l’État. «Les activités de la société Cotrefor sont symptomatiques du chaos organisé régnant dans le secteur de l’exploitation forestière en RDC, où la faible gouvernance et la corruption sont des obstacles majeurs à la protection des forêts», précise M. Monsembula.
Bienvenu Liyota Ndjoli, ministre congolais de l’Environnement et Développement durable, a publié mardi un communiqué démentant les accusations de Greenpeace.
Son ministère a «relevé, comme à l’habitude, une séquence de propos diffamatoires, jalonnée de confusions et d’amalgames, ce qui est, comme chacun le sait, la manière dont Greenpeace fait prospérer son fonds de commerce», écrit-il.
«Le fait est (…) que la RDC est un pays forestier largement sous-exploité et que le secteur de l’industrie du bois y a un impact écologique négatif très faible», ajoute-t-il, réaffirmant que son ministère est «engagé dans un processus de gestion durable et de valorisation du patrimoine forestier national».
Grande comme cinq fois la France, la RDC abrite plus de 60% des forêts denses du Bassin du Congo, deuxième massif forestier tropical de la planète après celui de l’Amazonie, selon la Commission des forêts d’Afrique centrale (Comifac).
Un rapport du cercle de réflexion britannique Chatham House estimait en 2014 que près de 90% de l’exploitation forestière du pays était illégale.
Chatham House notait néanmoins les efforts du gouvernement congolais pour mieux contrôler l’exploitation dite «industrielle», destinée principalement à l’exportation outre-mer, tout en notant que «la majorité de la récolte de bois en RDC» était «issue d’une exploitation artisanale illégale» destinée au marché intérieur ou régional.
AFP