* Un événement insolite s’est produit hier, lorsque Vital Kamerhe, le co-modérateur pour le compte de l’opposition au dialogue politique national et inclusif, a annoncé le retrait de l’opposition des travaux en commission. Selon lui, la priorité doit être accordée à la tenue de la présidentielle et des législatives nationales. Une position que ne partagent pas la Majorité Présidentielle, les personnalités politiques et la société civile
*Pour sa part, la Majorité Présidentielle à travers Emmanuel Shadari, estime que ceci ne veut pas dire que l’opposition est partie du dialogue. C’est tout simplement une technique de négociation et l’opposition doit prendre des moments de réflexion pour harmoniser ses vues. Ça se passe ainsi dans tous les forums et lorsqu’il y a des divergences, il faut chercher une voie de sortie, en vue de trouver des solutions, explique-t-il
La matinée à la Cité de l’Union africaine a débuté par la poursuite des travaux en commission, suspendus le samedi par les trois commissions mises en place, notamment la commission Confiance et équité, la commission Sécurité et Election.
Cependant, un événement insolite s’est produit dans les après-midi, lorsque Vital Kamerhe annonce par surprise le retrait de l’opposition des travaux en commission. Raison avancée selon lui, la priorité doit être donnée à la tenue de la présidentielle et les législatives nationales. Et ce, pendant que les travaux se poursuivent en commissions, où tous les délégués en ce, y compris les personnalités qui donnent d’ailleurs leurs points de vue et sont satisfaites de l’évolution des travaux dans leurs groupes thématiques respectifs.
« Nous voulons dire d’abord à l’opinion nationale et internationale que nous avons dit nous tous ici présents. Quand nous avons pris la décision de participer au dialogue, c’était uniquement pour appliquer la Résolution 2277 ; éviter le chaos à notre pays. Mais nous avions précisé dans notre message que cette situation a été savamment créée par la Majorité au pouvoir et nous ne saurons endosser cette responsabilité. Mais au nom de l’intérêt général, nous avons accepté de venir discuter avec les amis pour désamorcer la crise », déclare-t-il.
Pour l’opposition, la crise c’est la non-tenue de l’élection présidentielle dans le délai constitutionnel, c’est-à-dire l’application de l’article 73. Ceci étant pour l’opposition, le 19 septembre la Ceni devrait convoquer le scrutin présidentiel. Mais pour ne pas entrer dans l’impasse aux conséquences imprévisibles, l’opposition avait décidé de dialoguer sans franchir les lignes rouges. Lesquelles consistent dans le respect de la Constitution. Et la Majorité présidentielle n’a jamais dit le contraire.
Cependant, Vital Kamerhe indique que leur présence au dialogue est pour l’alternance au pouvoir. « Le temps que nous devons passer pour le calendrier doit être pour le besoin de tenir en priorité la présidentielle ; nous avons dit que nous sommes venus ici, non pas pour passer notre temps inutilement. Mais, aujourd’hui, les amis de la Majorité viennent nous proposer qu’on commence par les élections locales », ce que l’opposition refuse, en raison des groupements, dit-elle fictifs, sans population et qui se chevauchent partant de la décentralisation actuelle. Pour elle, c’est un chemin sans issue, raison pour laquelle elle suspend sa participation aux travaux en commission.
A la question de savoir pourquoi l’opposition a peur des élections locales, la réponse de Vital Kamerhe était non équivoque : la question a été mal posée, estime-t-il. Pourtant, elle est d’une grande importance de savoir pourquoi une frange de l’opposition s’en tient à la présidentielle et fuit les locales. « Le dialogue est un cadre extra-constitutionnel, si nous sommes au dialogue, c’est parce qu’il y a cette faille au niveau du pouvoir qui n’a pas tenu compte du fait que Gouverner c’est prévoir », soutient-il. A en croire les observateurs de la scène politique, il y a opposition et opposition. L’une veut une chose et son contraire, notamment la démocratie, mais refuse d’octroyer à la base ses institutions à travers la décentralisation qui est inévitable et réelle. Une autre opinion affirme qu’une frange de l’opposition n’est pas représentative au niveau de la base, notamment à travers toute la République. Aller aux élections locales, c’est précipiter leur mort politique. D’où, l’objectif pour eux de créer une impasse pour ne pas y arriver.
L’opposition se croit tout permis, même à dicter sa ligne de conduite, alors qu’elle est une des responsables de cette situation, lorsqu’elle récusa à deux reprises les calendriers partiel et global, alors qu’ils prévoyaient toutes les séquences dans le delais.
Emmanuel Shadari recadre les choses
La fuite en avant de l’opposition justifie ses agitations à l’Hôtel Kin Malebo à Kintambo, où elle s’est retirée pour concertation, avant la reprise des travaux ce mardi. Il est vrai que le mode de décision au dialogue est le consensus, mais avant d’en arriver-là, on doit tenir compte des avis des uns et des autres. Pourtant, l’on n’a pas encore pris la décision sur tel ou tel autre avis, l’opposition en champion de tout refuser, suspend sa participation aux travaux.
Cependant, pour sa part, la Majorité présidentielle à travers Emmanuel Shadari Ramazani, a indiqué que la Commission chargée d’examiner la question des élections affirme que le travail s’est déroulé en toute sérénité et que chaque composante donne son point de vue sur toutes les questions qui ont été posées sur les trois points principaux notamment sur le fichier électoral, les séquences électorales et enfin le financement des élections. Par ailleurs, s’agissant du fichier électoral, l’opposition qui intervenait en premier lieu a opté pour la refonte totale du fichier électoral. Cette option est en cours des travaux d’enrôlement de la Ceni dont l’opération a débuté au Sud Ubangui. Quant aux séquences des élections, Emmanuel Shadari précise que l’opposition avait opté pour la présidentielle couplée des législatives nationales et provinciales et que les élections communale et locale viendront en second lieu. Tandis qu’en ce qui concerne le budget et le financement, les recommandations ont été faites pour avoir le budget conséquent et que les décaissements se fassent en temps opportun. « La Majorité est aussi d’accord pour la refonte du fichier électoral en ce qu’elle a donné beaucoup d’arguments notamment en ce qu’il faille commencer par les élections provinciales couplées des locales parce que, pour elle, il y a déjà des candidats provinciaux qui ont déposé les candidatures depuis 2015. Leur nombre s’élève à 24 milles candidatures et ils ont même versé la caution », a argumenté le délégué de la Majorité présidentielle.
En fait, pour raison d’équité électorale, la MP estime qu’il fallait commencer par les élections provinciales couplées aux élections locales.
Il en va de même de la société civile dans sa grande majorité, elle qui vit à la base au quotidien, surtout les délégués qui sont venus de l’intérieur, ces derniers estiment qu’il faille commencer par les élections locales couplées des élections provinciales et que la présidentielle et les législatives nationales suivront par la suite, en seconde position. « Les personnalités avaient la même option de la refonte totale du fichier. Elles ont estimé pour raison de la justice électorale commencer par les élections locales couplées avec les provinciales et évoluer avec la présidentielle et les législatives nationales par après », a indiqué le délégué de la Majorité qui restituait l’évolution des travaux en commission élection. Il a ensuite indiqué qu’ils ont dégagé des convergences sur le fichier électoral que toutes les composantes et les personnalités sont d’accord pour la refonte totale du fichier électoral. Pour l’instant, il faut donner les moyens et le temps nécessaire à la CENI pour cette refonte totale, au regard des exposés faits par tous les délégués mais également au regard des contraintes techniques. « En ce qui concerne les séquences électorales, l’opposition a sa position ; la Majorité et les personnalités et la grande partie de la Société civile dont 18 ont dit qu’il faut commencer par les élections locales et 7 disent qu’il faut par les législatives nationales. Et la grande partie de la société civile, et les personnalités et la Majorité ont tous dit pour raison de justice électorale, il faut commencer par les locales. Pour l’opposition, elle a dit que pour la refonte du fichier électoral, c’est une condition, mais pour les séquences, il est impératif de commencer par la présidentielle, les législatives nationales couplées des provinciales », a-t-il soutenu.
L’opposition monte les enchères de négociation
Pour lui, l’opposition n’a pas mis fin au dialogue, mais par une motion elle a demandé de suspendre les travaux de lundi, en vue de se concerter et trouver une position commune sur les séquences électorales. « C’est ne pas dire qu’ils sont partis du dialogue, c’est une technique de négociation et nous avons compris qu’il faut prendre des moments de réflexions ; peut-être qu’ils vont nous convaincre, peut-être nous allons les convaincre. Ça se passe dans tous les forums, lorsqu’il y a des divergences, il faut chercher une voie de sortie, en vue de trouver des solutions », a-t-il indiqué. Il a été relayé par Jérôme Bonso, qui a abordé dans le même sens, justifiant qu’il faut octroyer à la base ses dirigeants, puisque longtemps les communes, les quartiers, les secteurs, les territoires ont été privés de dirigeants de proximités. C’est l’occasion, dit-il, de rétablir la justice électorale.
(Pius Romain Rolland)